De la relation homme/cheval naît l’équitation
Un constat s’impose : ce qui est enseigné d’un point de vue général ne répond pas aux attentes.
Par une forme de démocratisation de l’équitation, son enseignement s’est vu adapté aux exigences des clients … faisant que cette démocratisation s’apparente à une « massification » (à ce sujet, il est intéressant de consulter la communication de Jean-Pierre Digard). Au revoir les notions « d’homme de cheval »; quant à notre identité culturelle équestre, pas la peine de s’y attarder, les Anciens n’étaient que des barbares considérant leurs chevaux comme des outils, moyens de locomotion, armes, etc…, bref, n’en avaient pas fait des animaux de compagnie ! Pourtant, une expression leur survit : « pour aller loin, il faut savoir ménager sa monture ». Avec tout ce que cela comporte, vu les nombreux services auxquels les chevaux étaient destinés.C’est clair, l’inculture de la masse fait qu’elle ne voit pas plus loin que le bout de son nez, et qui plus est sans porter ses lunettes !
Ce qui n’empêche le fait qu’à cette époque « des Anciens », certains étaient probablement capables de n’avoir aucun soin particulier pour leurs chevaux (je ne parle même pas de considération !), ce qui ne fait pas de TOUS les Anciens des barbares tortionnaires de leurs chevaux, vus comme tels par nos « cavaliers du web » érudits derrière leurs écrans, incapables de tenir sur le dos de leurs chevaux sans être pendus aux rênes et je ne parle pas de leurs jambes ! Au même titre que de nos jours, il y a toujours des cavaliers peu soucieux du « bien-être » de leurs compagnons quadrupèdes, et ce quel que soit le « courant » d’équitation auquel ils se disent appartenir, et à plus forte raison dans leurs extrêmes (équitation dite éthologique, ou de dressage, pour ne citer que ceux-là, les dérives existent… et ne sont absolument pas qu’issues d’une équitation de tradition ! De nombreux écrits dont certains datent de la Renaissance exposent TRÈS BIEN le fait qu’on ne peut rien obtenir de bon en maltraitant le cheval…mais quand on ne veut voir que ce que l’on veut voir…).
Alternative !
Dieu merci des niches se sont ouvertes, répondant aux demandes d’un public insatisfait des prestations de la plupart des centres équestres et poney-clubs « lambdas » pratiquant une équitation fédérale de masse. Pourquoi pas ? Quoi que …
Il y a quelques années, la formule « équitation éthologique » a fait de nombreux adeptes répondant de façon magistrale à .. ce que l’on avait envie de voir et d’entendre…par des discours et supercheries particulièrement bien exposés dans l’article de J.-P. Digard. L’argumentation répond à l’insatisfaction des clients potentiels indignés des mauvais traitements infligés aux chevaux dans leur emploi. Ces clients échappant à la cotisation fédérale, la FFE s’est empressée d’instaurer une branche « équitation éthologique » dans son panel !
Ce qui ne me fait pas dire que l’éthologie soit à rejeter, bien au contraire ; mais que son implication dans l’équitation, adaptée pour la masse, standardise les principes en « trucs et astuces » qui marchent (plus ou moins… heum !). On est alors plus prêt de l’aliénation du cheval que dans l’établissement d’une relation… Sous des expressions bien choisies (respect du cheval, intégrité, etc…), le cheval devenu animal de compagnie a droit à une multitude d’expressions et d’activités où l’anthropomorphisme est Roi. La mode passe et les excès de ces pratiques sont mises en avant sur « le net »…
Internet ! Quel outil merveilleux. Tout circule à foison et pour s’y retrouver il y a fort à parier qu’on puisse y passer des heures…pour faire le tri. Par contre, avec la quantité exceptionnelle d’informations, quoi de plus facile pour imager des propos que d’associer à titre de comparaison, les photos d’un cheval monté à cru en simple licol et d’un autre subissant le rollkür… Le message est clair ! Et l’on entre dans l’alternative ; au sens où l’on a deux options, une bonne et une mauvaise, il me semble que c’est là le principe de l’alternative. C’est plutôt bien tourné, non ? Vous faites le bon ou le mauvais choix… si tant est que l’on puisse parler de choix ! Pour beaucoup, vu que « d’autres » ont fait la recherche à leur place, ce « vrai faux choix » leur convient et ceux qui ne font pas le leur sont donc « du camp opposé », stupides, ignares, barbares, irrespectueux, ou tout l’opposé : respectueux d’une éthique, attentionnés, etc… Il faut choisir son camp !
Héritiers d’un patrimoine culturel
L’inculture, aussi contradictoire que cela puisse paraître à l’époque du « web », fait qu’un grand nombre de pseudo-cavaliers n’a aucune idée de ce qui différencie notre culture équestre, nommée à l’étranger « l’Equitation à la Française », ou encore « la difficile facilité » ! Voire, ils ne s’imaginent pas qu’il puisse exister une « culture équestre Française » ! L’équitation est avant tout une affaire de praticiens. Il suffit d’aborder le sujet avec les cavaliers « d’ordinateurs », c’est édifiant… Est confondu savoir et … savoir-faire, car en équitation, il est évident que la culture est importante, mais c’est en priorité une question de savoir-faire, de ressenti. Comme l’a si bien dit J.-C. Racinet : « en équitation, celui qui n’a pas ressenti ne sait pas« ; à notre époque où je n’ai jamais autant entendu parler des « sur-doués », j’ai malheureusement l’impression que l’équitation n’est pas concernée par cette strate sociale… ceci dit, nous ne parlons peut-être pas de la même chose ! Ou encore, l’équitation ne mérite pas d’être évoquée, bref, pour ma part, en tant que cavalier et heureux de l’être, je n’en ai pas encore vu à cheval de façon « convaincante » au sens de se faire « oublier » sur le dos de leur cheval pour qu’il restitue tout ce que la nature lui a donné sous des directives « secrètes » (pour les incultes, nouveaux maîtres et gourous plus proches de l’imposture qu’autre chose, cette expression vient des Anciens (ces barbares) qui poussaient la relation avec leur cheval au point où un observateur ne pouvait pas voir une aide agir pour provoquer quelque mouvement que ce soit). Il s’agit des Airs stylisés par une gymnastique raisonnée POUR la préservation du cheval, et cerise sur le gâteau, qui magnifient le cheval (et éventuellement le cavalier, mais ce n’est pas la « priorité »; si c’est le cas tant mieux pour lui, mais c’est avant tout mettre en avant le Cheval sous son cavalier qui DOIT s’effacer). Pour en arriver là, pour marquer de façon indélébile une culture, n’importe quel cavalier comprendra qu’une relation s’est établie entre le cheval et lui. Pas besoin d’avoir un QI qui sorte de la « norme » pour comprendre ça…et qu’il s’agit de dépasser le simple fait de monter un cheval dans ses trois allures « naturelles »; ces allures, par les « leçons raisonnées » du cavalier-professeur, se sont stylisées, se sont embellies au PROFIT du cheval pour la beauté qu’elles expriment d’une part, et pour la préservation dans la longévité du cheval d’autre part. Il ne faut pas oublier que l’art équestre est, avant d’évoquer une activité artistique, l’art de régir les forces du cheval !
Notre culture équestre repose sur cet aspect de donner l’illusion de ne rien faire pour mettre en valeur le cheval, et que chaque acte envisagé sur le cheval n’a de sens que s’il est fait pour être « profitable » au cheval. Et c’est cette culture dont nous sommes tous héritiers et gardiens. Sans oublier que l’E.N.E., par le biais de ses écuyers, a à charge de la conserver et de la transmettre. Un problème se pose alors : comment, au sein de cette institution, faire cohabiter une autre mission dont elle a aussi la charge qui consiste à être représentée en compétition dont les exigences actuelles sont antinomiques avec la culture équestre. Il ne me semble pas possible de « marier » les deux sans prendre le risque d’induire des confusions chez les nombreux « profanes » et autres « amateurs » si nombreux à visiter ce « temple » de l’équitation Française. D’autre part, bien des moyens actuels mis en oeuvre pour « formater » le cheval en compétiteur sont, sans aucune contestation possible, plus du domaine de la maltraitance que de l’entraînement sportif : ce n’est pas pour rien que récemment, certains procédés d’entraînement sont punis d’un point de vue « pénal » dans des états européens…
Tous les services auxquels sont destinés nos chevaux ont un « tronc commun » dont l’origine est marquée par l’empreinte de notre culture. Et les caractéristiques de cette culture ne peuvent ressortir qu’en ayant une relation particulière avec le Cheval. Dès la Renaissance, les Pluvinel et contemporains exposent bien la considération qu’ils manifestent vis à vis des chevaux, loin de la barbarie à laquelle font allusion par incompétence équestre nombre de pseudo-cavaliers actuels, plus à mêmes d’aliéner en toute bonne foi des chevaux qu’ils sont incapables de « valoriser »… A contrario, devraient sortir de l’ombre des écuyers, des Hommes de Chevaux, chercheurs assidus œuvrant pour la magnificence du Cheval, tous ces illustres inconnus qui démontrent que par leur amour du Cheval, leur soif de compréhension, d’assimilation des expériences de leurs prédécesseurs, passent leur temps à dresser des chevaux dont personne n’aurait voulu dépasser le stade du « simple débourrage » ! Quelle leçon d’humanisme pouvons-nous retirer de cela à une époque où les « podiums » se gagnent à grands renforts de centaines de milliers d’euros ! Cette forme d’abnégation qui consiste à mettre en avant le Cheval qui est le seul à avoir droit au piédestal du podium, c’est dans notre culture … Qu’un cheval « nu » paraisse si laid, alors qu’employé, il devienne méconnaissable de beauté, véhiculant tout ce qui marque l’esprit des « amoureux des chevaux », c’est notre culture. Il faut connaître notre passé pour mieux appréhender l’avenir. Faire abstraction de ce passé pour tenter de pratiquer une équitation mondialisée par la compétition au même titre que se limiter à une équitation-éthologique ne peut pas, à mon avis, être bénéfique au cheval (il ne peut s’épanouir ni en devenant un « singe savant », ni en passant sa vie à « l’école primaire »).
Par cette abstraction, nous perdrons notre identité équestre… alors qu’elle est référencée par l’UNESCO !
Elle devait perdurer par le règlement de la FEI, et elle s’est commercialisée. Ce même règlement, pour ne pas éliminer des concurrents de réputation mondiale, se voit bafoué sans que personne ne puisse rien y changer. Quand aux juges, ils doivent juger ce qu’ils ne peuvent réaliser dans une discipline où l’on sait que sans avoir fait soi-même, …, on ne sait pas ! Donc, NON, la culture équestre ne peut se marier à la compétition telle qu’elle est pratiquée de nos jours. Doivent être dissociées, et ce de façon explicite, la culture de la compétition. Et si les deux doivent cohabiter, ce doit être dans deux « pavillons » bien séparés en sorte qu’aucune confusion ne soit possible.
Notre culture intègre la notion de légèreté ; il ne peut y avoir deux poids-deux mesures, et il n’est pas besoin d’être érudit pour faire la différence : par les enseignements issus de notre culture, montez un cheval dans la légèreté à la Française. Puis faites de même selon les observables du juge de dressage en visant le 8 du protocole. Expliquez pourquoi l’on voit deux extrêmes … ou qu’en est-il de la culture équestre au sein de la compétition qui devait s’en porter garante ?
Ces deux pratiques sont donc à dissocier et à l’heure où il est question de conserver le référencement de notre culture à l’UNESCO, il me paraît judicieux et honnête de différencier ces deux emplois du cheval ! Je ne fais là qu’exposer publiquement ce qui s’expose en comités restreints au sein desquels la chèvre et le choux sont ménagés sans aucun profit pour le plus concerné qui nous rassemble aujourd’hui : le Cheval !
Voilà donc un bon article, bien passionnant. J’ai beaucoup aimé et n’hésiterai pas à le recommander, c’est pas mal du tout ! Elsa Mondriet / june.fr